Une ville à Chandigarh

(Sources – Capture d’écran – Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

Synopsis

Documentaire – Lors de la partition de l’Inde en 1947, l’Etat du Penjab s’est trouvé divisé en deux parties et sa capitale, Lahore, fut rattachée au Pakistan, laissant la partie indienne sans ville gouvernementale.

En 1950, Le Corbusier est chargé de tracer les plans de la nouvelle capitale de la partie indienne, Chandigarh « le pays de la déesse Chandi », située au pied de l’Himalaya. Les travaux commencent en 1951, constituant pour l’architecte l’unique occasion d’appliquer à une ville entière ses concepts d’urbanisme. En 1966, la construction de la ville n’est pas encore achevée, mais elle compte déjà 120’000 habitants. La caméra suit les ouvriers, femmes, hommes, vieillards et enfants, sur les chantiers et montre comment la population indienne s’est appropriée cette ville neuve et moderne, finissant par lui donner une vie propre. Le commentaire, de son côté, nous entraîne dans des réflexions politiques, philosophiques et poétiques plus générales.

(Sources : Laura Legast et Marthe Porret – « Histoire du cinéma suisse de 1962 à 2000 » sous la direction d’Hervé Dumont et de Maria Tortajada – Editions Cinémathèque suisse et Gilles Attinger – 2007)

Photos du Film

(Sources : Swiss Films – Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Sources : Swiss Films – Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Sources – Capture d’écran – Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

Photos du tournage

(Source et Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

(Sources : Collection Cinémathèque suisse – Droits réservés Alain Tanner © Artaria Film)

Contexte

Contexte historique

Après avoir réalisé « Les apprentis » (1964), Alain Tanner travaille en freelance pour la télévision. Suite à une rencontre avec des amis de Le Corbusier, Tanner se voit proposer la réalisation d’un film sur Chandigarh. « Ce qui m’intéressait, dit Alain Tanner, c’était d’aller sur place voir comment Le Corbusier, l’un des génies de l’architecture de ce siècle, avait résolu tous les problèmes d’urbanisme qui se posent lorsqu’on édifie une ville sur une plaine nue, sans irrigation, voir aussi comment des gens regroupés artificiellement, dans une ville neuve, finissent par lui donner une vie neuve. » Début 1966, Tanner se rend à Chandigarh avec une équipe réduite composée d’un chef opérateur, Ernest Artaria, et d’un assistant, Fred Hufschmid. Cinq semaines sont nécessaires pour mener à bien le projet : une semaine de voyage, une semaine de préparation et trois semaines de tournage. Le film est produit par Tanner et Artaria mais financé en majeure partie par la BBC ainsi que par divers organismes. On fabrique deux versions, une en français, l’autre en anglais.

Le commentaire est de l’écrivain et essayiste anglais John Berger, qui inaugure avec ce film une longue collaboration avec Tanner. Ayant travaillé sans scénario, au jour le jour, le cinéaste, qui avait ramené d’Inde beaucoup de matériel filmé, peinait à l’organiser en une structure intéressante. Il demande donc à Berger si la mise en forme du matériel l’intéresse et s’il peut écrire un texte pour le film. John Berger accepte : « Le genre de commentaire que j’ai écrit était annonciateur d’autres choses que nous allions faire plus tard. Au lieu d’écrire un commentaire descriptif sur l’architecture, j’ai utilisé des citations de poètes et de théoriciens politiques qui furent placées en juxtaposition. » Dans la version doublée en français, le texte de Berger, traduit par Tanner, est également lu par ce dernier.

La première a lieu en octobre 1966 dans le cadre de la Semaine consacrée au cinéma suisse par la Maison des jeunes et de la culture de Genève. Deux mois plus tard, « Une ville à Chandigarh » est diffusé sur la TSR.

(Sources : Laura Legast et Marthe Porret – « Histoire du cinéma suisse de 1962 à 2000 » sous la direction d’Hervé Dumont et de Maria Tortajada – Editions Cinémathèque suisse et Gilles Attinger – 2007)

Par A. Tanner

Mercredi ou jeudi

J’aime beaucoup le rapport que les Indiens ont au temps. Nous étions en train de tourner en Inde un documentaire (« Une ville à Chandigarh ») sur la nouvelle capitale du Pendjab, qui a été conçue par Le Corbusier. Celui-ci avait fait le plan directeur de la ville qui comprenait toute l’idée urbanistique et avait dessiné lui-même tous les bâtiments principaux. Parmi ceux-ci, il y avait, sur le campus de l’université, un amphithéâtre en plein air, de style romain, mais en béton. Plutôt que de simplement le montrer à vide, nous avons eu l’idée d’y filmer un spectacle. Il existait à l’université une troupe de danseurs sikhs très talentueux, composée de garçons uniquement, et qui avaient tous très belle allure. Avec le professeur qui s’occupait d’eux et l’administration universitaire, nous avons organisé le spectacle et recruté trois cents étudiants pour garnir les gradins. Tout était fixé pour un mercredi à dix heures. Ce jour-là, nous sommes arrivés sur les lieux à neuf heures, pour préparer le tournage. À dix heures moins le quart, je commençais à m’inquiéter, car personne n’était encore apparu. À dix heures, toujours personne, pas un chat. À dix heures et demie, je décidai d’aller voir le professeur qui avait tout organisé pour savoir ce qui se passait. Je lui dis que nous étions prêts à tourner dans l’amphithéâtre, mais que ni les danseurs ni les étudiants étaient là. Je pensais qu’il y avait probablement eu confusion sur la date choisie. Non, il n’y avait pas de confusion, dit-il. Et il ajouta : « Demain, tout le monde sera là. » Il était tout sourire et ne s’excusa nullement de ce contretemps qui, pour lui, n’en était pas un. Et il n’avait pas jugé bon de nous en avertir : que cela se passe mercredi ou jeudi n’avait pas la moindre importance à ses yeux. Personne ici n’en est à un jour près. Notre notion du temps à nous n’a pas cours là-bas, et il ne faut en aucun cas chercher à l’imposer aux Indiens lorsqu’on travaille avec eux. C’est à nous à nous adapter, ce qui, au fil du tournage du film, ne me causait à moi aucun problème. Le lendemain à dix heures, tout le monde était là et nous avons filmé une superbe « danse des moissons ». Les danseurs et spectateurs partis, je me suis assis sur la dernière marche de l’amphithéâtre. J’ai regardé et écouté le temps qui passait, dans la douceur et sous le ciel bleu du Pendjab.

Non loin de là, sur la route, des paysans entraient dans la ville, apportant leurs produits sur des chars tirés par des bœufs. L’allure, la patience et la majesté de ces attelages étaient de nature purement philosophique, que l’on soit mercredi ou jeudi.

(Alain Tanner – « Ciné-Mélanges » Editions du Seuil – www.seuil.com – 2007)

Fiche technique

Titre: Une ville à Chandigarh
Année: 1966
Genre: documentaire
Scénario: Alain Tanner, John Berger
Réalisation: Alain Tanner
Montage: –
Photographie: Ernest Artaria
Assistant Photo: Fred Hufschmid
Commentaire: John Berger
Son: Fred Hufschmid
Musique: Chantern Kanta Khosla (sita), Gopal Das Garg (tabla), Sharda Bhardwaj (voix), Devendra Murdeshwar, Parma Lal Gosh, Praska Wadhera (flûtes)
Sortie: octobre 1966 (Genève « Théâtre de l’atelier »), décembre 1966 (TSR)
Prix: –
Production: BBC TV – Alain Tanner – Ernest Ataria Film (Genève)
Distribution: –
Format: 55 minutes – couleur – 16 mm
Tournage: Janvier 1966 – Chandigarh (IN)
Droits mondiaux: –
Version originale: –
DVD: Trigon Film (Suisse)

(Sources: Alain Tanner – « Ciné-Mélanges » Editions du Seuil – www.seuil.com – 2007 / Alain Tanner-John Berger, Tome 23, Coll. Théâtres au Cinéma, Bobigny 2011 – Laura Legast et Marthe Porret – « Histoire du cinéma suisse de 1962 à 2000 » sous la direction d’Hervé Dumont et de Maria Tortajada – Editions Cinémathèque suisse et Gilles Attinger – 2007)

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